Tout dissoudre : la poétique de la ruine dans Charøgnards de Stéphane Vanderhaeghe

Abstract
Le premier roman de Stéphane Vanderhaeghe, Charøgnards (2015), se présente comme un journal d’apocalypse dans lequel se dissolvent les composantes fondamentales du récit, de l’identité des personnages, de leur environnement, de leur quotidien, du temps, de la communication, et jusqu’à l’encre sur la page. C’est aussi le langage qui se désagrège, incarnant la ruine comme processus actif et inéluctable plutôt que dans une forme figée hors du temps. Quant à l’espace, pourtant peu représenté, son organisation simple mais fixe apporte une dose de stabilité au récit, attachant l’apocalypse intime du narrateur à une aire contenue et connue, à l’opposé de la portée globale qui caractérise nombre de scénarios contemporains de fin du monde. Notre analyse est traversée d’extraits d’une entrevue menée avec l’auteur, qui nous aident à éclairer sa posture face à l’histoire littéraire de notre motif et à sa capacité à traduire les angoisses du présent dans de nouvelles formes littéraires. Nous tissons également des liens entre Charøgnards et À tous les airs (2017), le second roman publié par Vanderhaeghe, ainsi qu’avec diverses expérimentations formelles ayant inspiré l’auteur, depuis le nouveau roman jusqu’à la littérature américaine postmoderniste.